La couleur des jours (1)
Troublée, elle a toujours su que sa vie serait comme ça. On ne née pas impunément le jour de la mort de John Lennon. Cette évidence elle l’a retournée dans sa tête plus de fois qu’il n’est raisonnable de le faire.
Pourtant ces derniers temps elle a cru échapper au chaos.
Elle a rêvée d’une amélioration, et maintenant ce rêve se mélange avec ses espérances.
Ces derniers jours elle a écarté les obstacles un à un et ce matin elle a rendez-vous. Un rendez-vous qui doit être le signe du renouveau.
En se levant, elle frissonne, une sensation de malaise la traverse mais le déclenchement du réveil de la chaîne hifi la détourne de l’ombre qui s’est déposée sur son esprit. Elle se met à sourire. Elle s’est toujours réveillée avant son réveil quoiqu’il arrive, mais elle continue à le mettre tous les jours. Elle ne s’est jamais fait confiance et elle sait qu’elle a raison.
Un bol de chocolat chaud, à 26 ans elle n’a jamais réussie à se mettre au café et n’ose plus s’acheter de céréales pour enfant, pourtant elle en meurs d’envie.
Deux brioches desséchées malgré l’emballage cellophane, elle n’a plus rien d’autre à manger.
Une douche.
Seulement des bruits lointains, elle a coupé la chaîne hifi, elle a besoin de se concentrer.
Après s’être préparée machinalement, elle va jusqu’à la porte d’entrée, passe cinq longues minutes à choisir une paire de chaussures. Engage le trousseau de clé dans la serrure. Regarde fixement la porte quelques secondes. Rassemble ses pensées éparpillées un peu partout. Passe ses deux mains dans ses cheveux. Inspire un grand coup. Ouvre la porte d’un coup sec. Mme Dublein sur le palier d’en face sursaute, lâche ses clés par terre. Fulmine. Ferme sa porte en jurant. Descend les escaliers tout en mâchant son mécontentement.
Son sourire s’épanoui, elle en est sûre maintenant c’est une journée violette.